Kreuzberg, la p'tite Istanbul

Après la chute du mur, on craignait que ce quartier mythique des squats et des artistes connaitrait un déclin culturel. C’est raté ! Kreuzberg est revenu en force sur la scène alternative !

Un quartier qui retrouve son pouvoir d'attraction

Kreuzberg

Alors que ses concurrentes de l’Est Prenzlauer Berg et Friedrichshain s’embourgeoisent, Kreuzberg a retrouvé un certain pouvoir d’attraction. Le quartier regorge de petites boutiques et de cafés en tout genre. Avec un tiers de la population d’origine turque, on l’appelle aussi la « p’tite Istanbul » !

Situé aujourd’hui au centre de la ville (pendant le mur, c’était le « bout du monde »), Kreuzberg reste un quartier ouvert sur le monde. Mais avec la réunification de la ville, le quartier est soumis à une pression sur les prix de l’immobilier qui oblige les populations les plus modestes à quitter leur logement.

Le quartier des "Gastarbeiter" des années 60

Kreuzberg

Les premiers Gastarbeiter turcs s’installent à Kreuzberg en 1964. La plupart de ces « travailleurs invités », censés rentrer au pays après quelques années de dur labeur, ne repartiront jamais. Ils resteront, pour leurs enfants.

C’est devant la mosquée Omar Ben Al-Khattab, inaugurée en 2010, que l’on abordera la question de l’immigration et de l’intégration à l’allemande – un modèle largement débattu depuis l’arrivée de milliers de Syriens dans le quartier.

La menace Airbnb et la gentrification

Mur de Berlin à Kreuzberg
Le Mur de Berlin à Kreuzberg, un quartier "bout du monde"

La ville se normalise, soumise aux mêmes dynamiques que les autres grandes capitales européennes, sous l’effet des plateformes comme Airbnb. La crèche, le petit café de quartier, la couturière turque cèdent la place aux bars à cocktails, aux restaurants mexicains et aux McDonald’s.

Les habitants, eux, n’abdiquent pas. Manifestations pour la resocialisation du parc immobilier, levée de boucliers contre l’implantation de Google dans le quartier voisin de Kreuzberg… La mobilisation contre les spéculateurs reste l’un des marqueurs de Kreuzberg, en pleine boboïsation, certes, mais toujours animée par une âme rebelle.

L’Admiralsbrücke, symbole des bouleversements du tourisme

On s’arrêtera à l’Admiralsbrücke, un pont anodin, mais qui incarne le Berlin d’après la chute du Mur. Le soir venu, les jeunes du monde entier s’y retrouvent, bières à la main, guitare en bandoulière. L’atmosphère y est bohème, imprégnée d’une insouciance palpable. Pourtant, la police évacue désormais les lieux à 22 heures, sous la pression des plaintes du voisinage. Même les écologistes organisent des réunions intitulées : « Au secours, les touristes arrivent ! ». Avant la chute du Mur, c’eût été inimaginable. Berlin, avec ses bars ouverts toute la nuit, n’a pas d’heures de fermeture. C’est là son principal attrait touristique.

Il est interdit d'interdire !

Kreuzberg Kommune 1

En 1968, une nouvelle population investit les sombres arrière-cours du quartier : étudiants extrémistes de gauche, objecteurs de conscience, artistes « bohèmes ». Ils squattent, repeignent, réinventent. Kreuzberg devient un véritable laboratoire politique, une mosaïque de cultures et de luttes.

Nous longerons l’Oranienstraße pour évoquer cette époque de libertés, parfois étouffantes. Nous passerons devant le club légendaire SO36 — ancien code postal du quartier — où David Bowie et Iggy Pop ont vécu des soirées mémorables entre 1976 et 1978.

Mariannenplatz, haut-lieu du mouvement des squats

Kreuzberg

Nous irons à Mariannenplatz, cœur des mouvements de squat dans les années 70 et 80. On peut dire qu’ils ont sauvé le quartier en occupant illégalement des maisons inoccupées. « Plutôt entretenir des maisons en les squattant que de laisser des logements vides tomber en ruine », disaient-ils. À l’époque, tout le quartier était voué à la destruction. Une autoroute devait même le traverser. Au final, les squatteurs d’hier sont devenus les propriétaires d’aujourd’hui…

Je vous montrerai l’intérieur de la cité d’artistes Béthanie, installée dans un ancien hôpital religieux. Ce centre culturel, financé par la ville, reste cependant autogéré.

Markthalle Neun, symbole du nouveau Kreuzberg

Pour déjeuner, si le cœur vous en dit, on terminera la visite à la « Markthalle Neun », véritable symbole du renouveau des halles berlinoises. Ici, l’atmosphère est vibrante, entre producteurs locaux passionnés, artisans bio engagés et une offre de street food inventive qui marie saveurs traditionnelles et influences du monde entier. Chaque stand raconte une histoire, qu’il s’agisse de charcuterie artisanale, de pains au levain cuits sur place, ou de spécialités venues d’Asie, d’Amérique latine ou d’ailleurs. Le lieu est devenu un point de rendez-vous incontournable pour les Berlinois en quête d’authenticité et de qualité, un microcosme de la diversité culinaire qui fait la force de la capitale allemande aujourd’hui.

Sites présentés : mosquée Omar Ben Al-Khattab, Landwehrkanal, Admiralsbrücke, Kottbusser Tor, Oranienplatz, Canal de la Luisenstadt, Mariannenplatz, cité d’artistes Béthanie, église évangélique St-Thomas, Markthalle Neun

FICHE PRATIQUE
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Durée : 3 heures.
Distance : 4 km.
Départ : mosquée Omar ibn al-Khattâb
Arrivée : Markthalle Neun
Rendez-vous : U-Bahn Görlitzer Bahnhof